Quelques mois avant la fête de l'EmpereurIl existe des personnes qui savent ce qu'elles veulent. Et qui se donnent les moyens de parvenir à leur fin. Alastor était de ces gens. Depuis longtemps maintenant, il était parvenu à tisser un réseau de relations si vastes qu'il se surprenait lui même. Pas une nation de Solaris ne pouvait se vanter d'échapper à son oeil acéré. Un réseau aussi dense coûtait cependant cher et même lui se devait d'assurer la pérennité de son propre métier pour poursuivre sur la voie qui était la sienne. Un voleur. Voilà ce qui le qualifiait. Un peu vulgaire et restrictif mais globalement vrai. Ce qui ne l'empêchait pas d'aspirer à obtenir des choses plus grandes encore.
Telle était d'ailleurs la raison de sa petite escapade nocturne aujourd'hui. Depuis maintenant deux heures, alors que la nuit était déjà bien avancée, il était resté là à attendre, camouflé par les ombres de ces bâtiments. Attendre qui ? Quoi ? Alastor se vantait d'avoir l'oreille sur toutes les histoires les plus intéressantes d'Aphélion. Savoir trier les informations importantes était un don qu'il possédait et depuis peu, la rumeur enflait au sujet d'un certain homme. Un dénommé Castiel qui se voulait prudent. Discret même. Le bruit courait qu'il était un chasseur de prime. Les mauvaises langues préféraient le terme de "vautour". Mais pour le Telarana, il s'agissait surtout de mettre la main sur quelqu'un qui avait apparemment tiré son épingle du jeu. Le nombre de chasseurs de prime était ahurissant et savoir se démarquer était rare. Même lorsque l’on ne voulait pas se faire connaître, lorsque l’on accomplissait ses missions avec succès, on finissait toujours par attirer l’attention.
Pas forcément des forces de l’ordre… Car les malfrats et autres bandits étaient encore plus scrutateurs que la police lorsque leur activité en dépendait. Quoi qu’il en soit, l’homme semblait de passage à Aphélion. Et chacun savait à quel point ce genre de personne avait la bougeotte. Connaître son adresse du moment avait été d’une simplicité absolue pour le maître des voleurs. Quant à sa description, bien que sommaire, elle était suffisante pour le repérer parmi d’autres. Entièrement vêtu de noir, Alastor avait préféré faire dans le discret et le sobre afin de ne pas attirer l’attention. Ses activités commençaient à chagriner les autorités qui, bien que ne le connaissant que sous le pseudonyme de Soronne, essayaient tout de même de lui mettre le grappin dessus.
Faire le guet était une habitude dans son métier. Et il savait d’expérience qu’il était préférable de cueillir cette personne avant qu’elle ne pénètre chez elle. Non pas que quiconque puisse appeler ce taudis « maison » mais disons que le voleur connaissait l’impact psychologique que pouvait entraîner une rencontre inopinée de ce genre. Et il comptait évidemment en profiter au mieux. Alastor le sentit plus rapidement qu’il ne le vit. Une sorte d’instinct. L’ombre de l’homme se détachait des murs voisins. Calme. Preuve d’une confiance en soi importante : les rues d’Aphélion étaient dangereuse la nuit. L’heure était donc venue de se rapprocher de lui.
Il ne lui fallut pas dix secondes pour arriver juste derrière cet homme. L’avait-il déjà sentit ? C’était plus que plausible au vu de sa réputation. Mais insuffisant pour effrayer un homme comme Alastor. Alors qu’il se retournait – donnant ainsi l’occasion au voleur de confirmer qu’il s’agissait bien de sa cible – Soronne leva les deux bras et esquissa un petit sourire.
- Tu n’es pas un homme facile à trouver. J’ai besoin de te parler. En privé… Je viens de la part de quelqu’un d’important par ici et qui a entendu parler de toi. Peut-être que le nom de Soronne te dit quelque chose ? Si non, je serais ravi de t’en apprendre plus. Mais pour ça, nous avons besoin d’être tranquille.
Un chasseur de prime était habitué à être contacté par tous les moyens possibles. Souvent, les clients recherchaient l’anonymat. Sauf qu’aujourd’hui, le client était un peu particulier. Et s’il ne se nommait pas lui-même comme étant Soronne, c’était aussi pour voir si les rumeurs concernant ce type étaient fondées. Car pour l’occasion, Alastor avait troqué son cache-œil pour un masque partiel, cachant une partie de son visage et camouflant sa particularité physique.
Dévoiler ses cartes trop rapidement étant trop dangereux pour un homme comme lui.